dimanche 10 février 2019

Attendre espérer patienter

Cinq  ans  déjà  que  Ma  est  partie. 
J'avais  promis  d'emmener Pa sur  la  tombe de  Ma et j'avais gardé  une journée sur  les  vacances.

Vacances ?
Trois  adorables  petits  monstres  vont  investir  la  maison  pour  huit  jours : 
Mimosa  9 ans (celui de  viva  la  révolution  et  de   cache  tampon qui  dès  qu'on  relâche la  surveillance s'abîme  le cortex  en assistant  à  des  jeux en ligne, 

Tite Nana 7  ans  traductrice  officielle  de LunetRouges  3 ans ...
Mais  voilà  Pa  est  tombé...
Frère  est arrivé  rapidement pour  gérer l'urgence avec les  ambulanciers  aux  taquets.
Puis  il  a fallu  patienter ... 14h  sur un brancard, d'abord  dans  un box puis  dans  une  chambre où la  sonnette ne  fonctionnait  pas. Ce n'est  que  vers  2h  du matin qu'il  s'est  retrouvé  dans  une  chambre  en  chirurgie. Pendant  tout  ce  temps,  il  a  fallu  répondre  à ses  angoisses, en  lui  disant  que la  chirurgie était  la  seule  solution, même  si la gestion des  suites  allait  être  compliquée.
J'ai  retrouvé  le  Pa  revendicatif et parfois injuste de 2009 après  sa  chirurgie  cardiaque et  de  2014  lors  de  la maladie  de  Ma. 
Ce n'est  pas  simple  à  gérer, surtout  pour  Frère,  mais  ça  me permet de garder  une  distance et  de  ne  pas céder  à l'angoisse.  
Bien  sûr, je  flippe  quand je  réalise  sa faiblesse, et  même  en  écrivant  ces lignes.
Attendre, patienter, espérer faire  confiance  aux  confrères  et  au  personnel de l'hôpital...
J'ai  mauvaise  conscience : j'avais  prévu  d'aider Gabrielle  à  gérer les  petits  enfants.

J'ai  réintégré à temps  partiel ma  chambre  dans l'appartement  de Pa...Il  y  a le  silence,  le monde  bien  rangé de Pa  : son ordinateur, les photos de  Ma souriante et des grands parents, les  orchidées en fleurs, les tulipes qui vont  éclore.
Je maîtrise  mal  le dosage  idéal  pour  la  machine à  café, (Pa n'a  jamais  voulu  que  j'y  touche) mais je  progresse (celui  d'aujourd'hui était  buvable) j'ai laissé   la  radio  bloquée  sur  "rires  et  chansons" dans  la  cuisine, c'est  ça  ou  le  silence ou l'écoute  d'une  autre  station sur ordinateur.
C'est  une solitude différente  de  celle  de  cet été car  ici  même  si je  suis en  terrain  connu,  je  ne  suis  pas  chez  moi : chaque  fois  que  j'ose   transgresser  cet  ordre  établi, j'imagine  les  reproches de  Pa : pourquoi  le  presse  agrumes  est  il  resté  dehors  ? il  faut  laisser  le  thermostat  de la  douche  à 30, fermer tous  les volets ...
Je ne  me  moque  pas, je  suppose que  j'aurai  mes  manies  et  exigences  en vieillissant  et  j'en  ai  sans  doute déjà.
Je  pense  à  tout  ce  que j'ai  laissé  en plan (outre Gabrielle  et les  petits  monstres et  outre  mes patients) écrire  à  mon  ami  Ali qui  est  en  fin  de  vie, rendre  visite  à  Andrée seule face  à  un  cancer métastasé, écouter Dom  dont  le coeur donne  des  signes  de  faiblesse,  écrire aussi à  ceux  qui  vont  bien et  trouver  un  moment  pour se  réunir  autour de la Table (que  j'ai  vidée  en  speed pour  le  cas  où mon  exil se  prolongerait). 
Et  il  y  a  les  livres  et  mon  basson...
Petit  Frère  t'inquiète pas  pour  moi  je  vais  tenir  Nous  allons  tenir  et  Pa  va  recommencer à  marcher, nous  retournerons un  dimanche  sur  deux dans  ce  restaurant  qui  te  sort  par  les  yeux, et  Pa  se  scandalisera sur  chaque  chose  que  j'aurai  oublié  de  remettre  en place.   

 

3 commentaires:

  1. Réponses
    1. J'allais le dire, donc je répète !

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    2. Merci Adrienne et Walrus je suis calme et patient fataliste et terrifié aussi Vos messages font chaud au coeur les amis

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