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dimanche 26 octobre 2014

savoir se vendre ; vendre son âme


Vous qui passez ici patients, médecins, aurez du mal à imaginer la diversité de l'ophtalmologie, persuadés que vous êtes que notre spécialité se résume aux lunettes ou à l'opération de la cataracte, avec un léger saupoudrage de pathologie histoire de justifier 10 -13 ans d'études de médecine.
Nous avons déjà abordé la question lors d'un échange avec docteur V et j'en avais parlé dans un post ancien au début de ce blog
Les lunettes sont  un casus belli au sein même de la spécialité :
devons nous continuer à "faire des lunettes", seuls ou aidés par des orthoptistes  salariés, ou au contraire devons nous mépriser/ refuser les demandes de lunettes, abandonner le terrain aux opticiens ou aux opto, afin de nous concentrer sur les parties "nobles" de notre métier : la Pathologie  et la Chirurgie avec plein de majuscules partout ?
De là découle une autre question peut être plus aiguë chez nous que dans les autres spécialités ; elle nous divise encore plus : sommes nous d'abord des médecins- chirurgiens ou d'abord des entrepreneurs ?  

Je n'avais pas très envie de revenir sur l'aspect lunettes de notre profession ; c'est un moyen très sûr de se fâcher avec ses vieux amis... heureusement, rares sont ceux qui passent ici me lire, trop occupés, m'ont ils dit, à prescrire les lunettes des patients qui n'ont pas obtenu de RDV chez moi ! 
Lors d'une de nos rencontres, je m'étonnais d'avoir peu de  consultations lunettes (et je regrettais mon faible taux de Kévin(s ) : un de ces vieux amis m'a rétorqué : "c'est parce que c'est nous qui voyons tes lunettes ".
Si j'avais voulu que les glaçons continuent à tomber entre nous,  j'aurais rétorqué que moi, je voyais les urgences qu'ils avaient refusées ou qui n'avaient pu se manifester auprès de leurs secrétariats injoignables. J'ai juste répété qu'au contraire, j'aimais "faire des lunettes", mais que lorsqu'il n'existe qu'un RDV libre dans une journée, celui ci est donné prioritairement à une urgence,  surtout si de son côté,  le candidat aux lunettes rebuté par nos délais montés en épingle, n'a même pas essayé de me joindre.
Autrement dit, j'apprécierais qu'on ne me reproche pas d'avoir refusé un RDV qui ne m'a pas été demandé.
 (j'en avais déjà parlé là)


L'autre grande question concernant notre spécialité  : "l'ophtalmologiste médecin, entrepreneur, ou les deux ?" déchaîne une guerre bien plus violente, même quand les propos restent feutrés. 
La réponse fréquente "consensuelle" et politiquement correcte est : "les deux à la fois" en disant  que la balance penche nettement vers la médecine, c'est mieux pour notre image... C'est bien, on ne vexe personne, on évite les conflits jeunes-vieux, S1-S2, aidés-isolés...
Il arrive néanmoins, souvent à l'occasion d'une discussion sur les lunettes,  que la hache de guerre soit déterrée et que chacun s'enflamme, prêt à lancer des horreurs au camp d'en face.    
La priorité d'un médecin est de soigner. Est ce que les supermarchés lunettes qui refusent les enfants, éloignent les personnes âgées porteuses de pathologies lourdes(prise de tête et bouffeuses de temps) pour se concentrer sur les lunettes et les lentilles font de la médecine malgré ce "tri sélectif "? 
Est ce que ceux qui se permettent une publicité sur leurs délais courts, moyennant 60 personnes par journée de consultation et par médecin, font de la médecine ?   
  J'ai déjà répondu à ces questions. Je suis d'abord médecin et en tant que tel je fais de mon mieux pour répondre à la demande des patients qui me font confiance. Je me refuse à faire ce "tri sélectif" qui consiste à  privilégier Kévin versus Léontine
Comme travailleur libéral, je suis aussi entrepreneur  puisque j'emploie des salariés, puisque je dois en permanence veiller à l'équilibre de mes comptes, mais je ne le suis pas puisque je n'ai pas à reverser mes bénéfices à des actionnaires.
Bien des voix s'élèvent pour nous pousser à nous regrouper ou pour suggérer aux plus vieux d'entre nous d'intégrer des structures capitalistes  à quelques années de nos retraites sans successeurs. *
 N'insistez pas,  j'ai parfaitement intégré le mythe de Faust : je ne suis qu'un vieux con atrabilaire, je n'ai pas l'intention de signer le parchemin, de vendre mon âme. Car même si j'ai de sérieux  doutes quant à l'au delà, je veux pouvoir continuer dans cette vie là,  à me regarder dans la glace tous les  matins en me rasant.


(photo Basile Segalen)



*(Rapidement au sujet de nos retraites sans successeurs, je suis de plus en plus "agacé" par mes propres amis et membres de ma famille qui refusent de croire que je vais un jour déplaquer sans successeur : non seulement ils ne me croient pas alors que j'en parle depuis 10 ans, mais ils se permettent d'ajouter égoïstement : "et comment on va faire NOUS ?")

PS j'allais rarement sur le blog du Docteur Sachs junior (ben j'avais tort)  et je découvre ce post  je vous laisse réfléchir au rapport avec ce qui précède.Il est rare mais ça arrive que je passe 50 minutes avec un patient .Pour un médecin  de supermarché à 60 patients/jour cette attitude serait  une incongruité ou un motif de renvoi.

2 commentaires:

  1. Cher Zigmund,

    je vous crois que cela va arriver, sauf un miracle, de déviser s aplaque sans successeurs. ceci est arrivé à on ophtlamono,gue francais au début du siècle, alors vers une époque où le manque de médecin spécialsite d el'oeil n'était pas autant qu'actuellement.

    En Allemagne égalemnet, la jeunesse fait défaut, plutôt pas assez pour reprendre. Malgré les maisons médicale (Ärztehus, etc), le monde médical vire complètement son aspect principal et primordial (pour moi): de Soigner et qu'ensuite de faire (si possible) de faire du profit. Helas, le mond eva vers le profit d'abors et qu'ensuite soigner devient un enjeux - mais pas identique pour tous, non selon les moyens finanicier de la personne soignée. Bref, un pas vers le retour où les puissant et riches ont toujours eu la meilleure prise en charge médicale quand aux autre gens... qu'ils se débrouillent.

    Vos proches feront comme les autres qui veulent point croire qu'un jour, l'acces aux soins va être une lutte rien que pour obtenir un RV : ils se debrouillent et devront faire les 1000 et 1 appels pour otenir un médecin soignant.

    Bonne soirée

    PS comment va le chat extra terrestre?

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  2. ma perception de l'évolution de l'ophtalmologie est voisine de la votre et c'est pour ça que j'ai écrit ce billet . Ceci d'autant plus qu'à la veille d'élections au syndicat des ophtalmos ces 2 visions de l'ophtalmologie s'affrontent.
    Zigmund chat extraterrestre va bien/ Titoute l'embête un peu quand elle daigne se souvenir qu'elle habite chez nous (fugueuse+++)

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