L'erreur fut peut être de partir en retraite...mais je n'avais pas le choix.
L'erreur fut de croire que j'aurais enfin du temps pour moi...
L'erreur fut d'imaginer qu'une fois ma plaque dévissée, je m'occuperais de moi et de ma foutue table...
L'erreur fut de garder ma lampe à fente ( ma princesse ) pour rendre service aux amis...
L'erreur est d'avoir appris à écouter et à compatir, et d'avoir encore quelques forces pour aider...
Outre l'administratif lié à la préparation de la retraite qui a aggravé, si c'était encore possible, le désordre sur la table, il y eut le traumatisme des "adieux" à mes patients, ceux que je suivais depuis près de 35 ans, ils allaient devoir partir larmoyer au propre comme au figuré pour trouver un autre ophtalmo.
Quelqu'un m'avait dit que les ophtalmos vieillissaient mal et voilà, c'était mon tour.
Mes patients n'avaient sans doute pas perçu la différence, mais je savais bien que mes gestes étaient un poil moins précis, ma vision moins performante pour examiner les fonds d'yeux. Rien de grave ou de dangereux mais ma "force de travail " avait encore descendu d'un cran. Je me sentais vieux et fatigué. Il fallut aussi me séparer de mes livres chéris et des objets qui faisaient partie de mon univers. La force me manqua pour me séparer de ma "princesse " qui se retrouva dans le coin d'une pièce déjà encombrée "au cas où" ...
Le temps file encore plus vite qu'avant, et comme je manquais déjà de temps, je me suis mis à rendre visite à quelques patients âgés et isolés devenus des amis. J'ai parfois du mal à me décider à y aller, mais une fois auprès d'eux, je n'ai pas de regrets. Je suis là où je dois être.
Je n'ai jamais oublié cette femme âgée plutôt sympathique, vivant en maison de retraite où je travaillais comme infirmier : d'après le personnel, malgré une famille très nombreuse elle n'avait pas une seule visite ...et je me demandais comment on pouvait arriver à une telle solitude.
Bien sûr, je pourrais voyager, histoire de me changer les idées... mais c'est impossible : je n'ai pas eu le courage de programmer un petit voyage à l'étranger, et le golfe du Morbihan scintillera sans nous cette année, car nos amis bretons sont partis au loin.
De plus, nos matous sont devenus peu gérables et nécessitent des cat-sitters patients et expérimentés.
La vie coule doucement malgré la flemme et le manque de temps, nous nous lançons dans des expériences culinaires plus ou moins réussies : pain (top!!!) flan aux courgettes (bof!) tajine (moyen) ; le jardin prend des allures de jungle non maitrisable. J'envisage de m'initier au tir au pigeons car ces saloperies de rats volants n'ont pas laissé l'ombre d'une cerise dans notre cerisier. (les chats n'ont pas fait leur boulot)
Je me suis remis à lire : l'usage du monde de Nicolas Bouvier histoire de profiter des voyages des autres dans des pays que je ne verrai sans doute jamais...
L'éte vient à peine de commencer, et j'ai le coeur en automne.
Bienvenue dans le monde des retraités, celui des "Je croyais que c'était hier !" :-)
RépondreSupprimerc'est tout à fait ça quasiment pas pu m'offrir de grasse mat ...et parfois je rêve de m'ennuyer
Supprimerce n'était sans doute ni le bon moment ni les bonnes circonstances pour prendre ta retraite, mais à quel moment toutes ces choses-là sont-elles réunies, si on aime son métier avec passion?
RépondreSupprimerbon courage pour la suite!
j'ai repoussé au maximum ne serait ce que pour éviter le déménagement des instruments et des livres de mon cabinet et d'avoir à leur trouver une place dans la maison ou les emporter en déchetterie parce que personne n'en veut . c'est ça le plus triste : de ces livres ou instruments qui valaient cher (et qui m'étaient chers aussi car en 40 ans on tisse des liens avec les objets ) et qui construisaient mon univers plus rien n'a de valeur...
SupprimerIl faut bien dire que quand mon ancien ophtalmo mesurait ma pression oculaire en me mettant des gouttes dans les yeux puis en venant coller à leur surface un instrument d'optique, c'était un peu plus compliqué que la machine de l'actuel qui me fait pfft! dans l'œil et c'est vendu ! :-)
Supprimeren fait je faisais les deux soit avec les gouttes (plus précis) soit avec le jet d'air (plus rapide ) on s'est pas mal bagarrés entre oph pour savoir lequel était le plus sûr en période covid et comme souvent en médecine il y a des arguments des 2 côtés
SupprimerLa retraite est difficile à vivre, surtout au début, mais effectivement, c'est un soulagement d’arrêter car, comme tu l'as dit, on est moins performant et, en plus, en tant que généraliste, les correspondant partent progressivement à la retraite et, comme il n'y avait plus de FMC, loi anti cadeaux aidant, il m'était quasiment impossible d'en trouver pour les remplacer.Comme je m'étais inscrit, sur une adresse mail, à des newsletters (VIDAL, Syndicat..), je vois un peu ce qui se passe. Mais, ce qui manque le plus, c'est le contact avec le malade et ses histoires de chasse (le bon coup qui fait qu'on se sent utile). Heureusement le blog occupe un peu.
RépondreSupprimerPareil je garde le lien avec ma spé via internet .les congrès en viso sont affligeants malgré l'intérêt des sujets abordés . Effectivement j'avais commencé à me rendre compte du hiatus avec la nouvelle génération Je me souviens que qd j'étais jeune je regardais les vieux oph avec bp d'intérêt en imaginant que je deviendrais comme certains d'entre eux .Je n'ai pas cette impression avec les jeunes oph . ça m'a attristé cette impression que j'étais un peu transparent pour eux. Oui beaucoup de choses sont tristes dans la retraite . un point positif : maintenant j'ai le temps de me soigner... avant je devais choisir entre prendre le temps de soigner mes patients ou me préoccuper de ma propre santé :-)
SupprimerTrès heureux anniversaire, cher Zigmund !
RépondreSupprimer(Ceci au cas où aucune de tes adresses mail en ma possession ne serait plus d'actualité)
Meilleures amitiés !
hello Walrus et merci j'avoue que voir arriver mon anniversaire m'attriste un peu pas tant par peur de vieillir mais parce que la fin de de l'été approche à grands pas
RépondreSupprimerC'est tout l'intérêt d'avoir un travail pas passionnant : on attend la retraite avec impatience et je suis sûre que je serai vraiment heureuse quand elle arrivera enfin ! L'inconvénient, c'est qu'on s'ennuie ferme pendant les quarante ans qui précèdent. Bon.
RépondreSupprimerJ'espère qu'avec un peu de recul la tristesse s'estompe et laisse place à un nouveau quotidien agréable et riche...
j'ai supprimé un de tes 2 comm en doublon la tristesse qd elle arrive est due aux signes du vieillissement En gros comme dit le Chat de Geluck on est enfin libre de faire tout ce b qu'on n'a plus la force de faire
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