26 septembre 2009 Ecrit pour le défi du samedi
Grave et non transpositeur… (Zigmund)
Je suis beau, grand, sombre et rare, à tel point que je soupçonne Zigmund, mon maitre de m’avoir choisi, plus pour flatter son ego, que par véritable amour.
Déjà quand il m’a acheté à Edwige, une vraie professionnelle, il a avoué sans honte qu’il travaillait peu, qu’il était flemmard, et que finalement il allait m’offrir une belle retraite…
Passent les jours et les semaines où je reste puni, enfermé dans ma boite. Parfois, il me sort de ma prison, et prend le temps de me monter : grande branche, petite branche sont insérés dans le morceau inférieur, puis installation du bocal et du pavillon. Quand tout est prêt, il me fixe au collier, pose une l’anche amoureusement choisie dans une boite, après en avoir tiré un son hideux aigu qui fait sursauter tout le monde (il dit que c’est son moyen personnel de savoir si l’anche lui convient).
Parfois il me regarde avec un air coupable et caresse en rêvant mes clefs couleur d’argent et mon corps de palissandre. Coupable il l’est, c’est une évidence, il n’en fout pas une ramée et quand arrive le jour de son cours, il trouve des excuses toujours différentes pour justifier son niveau lamentable auprès de son professeur consterné.
De nos vingt ans de vie commune, je garde, néanmoins quelques bons souvenirs : quand il a arrêté de fumer, plutôt de s’exciter sur un punching ball, il s’est mis à travailler à chaque fois qu’il avait envie d’une clope… (Et il était souvent en manque !) Et puis cette promesse toujours tenue, de ne jamais m’abandonner dans une voiture… du coup, il m’emmenait partout avec lui, même sur les plages naturistes de Bretagne.
Le temps a passé, je trône, unique dans l’orchestre, à l’extrême gauche le plus souvent, proche de mes copains les violoncelles qui doublent ma partition pour camoufler les couacs de Zigmund. Vous verriez comme il se pavane, quand il entre dans la salle de concert, en me tenant comme un fusil sur son épaule, et qu’il rejoint son pupitre*, fier** devant les spectateurs (lesquels chuchotent : « c’est quoi cet instrument ? »)…pourtant il devrait avoir honte, tout juste capable d’aligner quelques noires, s’étouffant à la moindre série de doubles croches, et prêt à m’accuser de ses nombreux canards.
On ne me verra plus jamais briller dans Pierre et le Loup (dans le rôle du grand père), ni dans l’apprenti sorcier, et encore moins dans le concerto de Vivaldi, néanmoins, ce piètre musicien a tenu sa promesse de retraite calme et finalement heureuse, je sers de camouflage aux chats sur le fauteuil du salon où j’aime à intriguer les visiteurs en attendant qu’il se décide à travailler.
(* « Pupitre fait de la résistance »
** « fier comme un petit banc »,
sont les calembours préférés de mon maitre)
Waouh vive les liens Quel superbe texte en finesse faire chanter son instrument aussi joliment ! Ça me fait penser au saxo dans son grand étuis en
RépondreSupprimerplastique bien seul attendant qu'un(e) futur petit fils se lie d'amour pour lui
Bravo
mauvaise manipulation ou pas j'avais écrit un petit message mais ... Voilà je ne sais si tu le recevras ...en espérant que celui là arrivera !
RépondreSupprimerJe ne le récris pas mais te dis quand-même que j'ai aimé ton texte !
oui ton message est passé (mais en différé parce qu'il s'agit d'un vieux post) merci
Supprimerj'ai un fils musicien (violon alto) j'e n'ai pas de petits enfants mais si j'en ai j'espère qu'ils aimeront la musique et que l'un d'eux reprendra mon basson bon dimanche